Après Hocus Pocus naissait le projet Ledeunff
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Depuis 2011, David Ledeunff écume les bars de l’ouest avec sa guitare. Sa voix soul et cassée, accompagne la danse de ses doigts sur les cordes. Portrait d’un artiste discret, qui a fait ses armes aux côtés des Nantais d’Hocus Pocus.

A l’écouter, on imagine qu’il est né avec une guitare entre les mains. Le chanteur à la voix folk et suave ne fait pas ses 35 ans. Coupe à la Jackson five sur la tête, sourire en coin et yeux rieurs, David est à la fois bavard et dans sa bulle. Né en Guadeloupe, du haut de ses quatre ans, il troque son île tropicale contre les eaux un peu plus froides du Morbihan. David grandit à Belle île, où il fera le lancement du festival Belle Ile On Air avec Hocus Pocus. Mais ça, il ne le sait pas encore.

A 13 ans, il commence à gratouiller et très vite la musique prend une place considérable dans sa vie : « ça m’a tout de suite permis de m’exprimer. Ca m’a donné une voix, j’ai trouvé mon langage ». Pour David, la musique est autant passion qu’exutoire. Elle lui permet de rencontrer des gens, de voyager, et de vivre ! « Qu’est ce qu’on veut, l’aventure ou la finalité ? C’est l’aventure ». Sa philosophie : Aller au bout de ses rêves, mais ne pas se tromper de rêve. David est une force tranquille. « La musique, c’est un peu mon yoga. C’est un tout, c’est pas juste vivre et raconter sa vie, c’est un bien être. Je suis très bien à jouer chez moi. Je veux rester une énergie pure ».

« En fait, je ne connaissais pas ma gamme de Do jusqu’à il y a deux ans, mais bon, ça ne m’a pas empêché d’aller jouer avec mes copains d’Hocus à l’Olympia ! »

Auteur, compositeur, interprète. David est autodidacte. « En fait, je ne connaissais pas ma gamme de Do jusqu’à il y a deux ans, mais bon, ça ne m’a pas empêché d’aller jouer avec mes copains d’Hocus à l’Olympia ! » se marre-t-il. Inspiré par des mecs comme Kurt Cobain et Jimi Hendrix, on dit qu’ils ne savaient pas forcément lire ni écrire la musique, ça ne les a pas empêché de s’exprimer. Mais David veut pousser les choses. « Plus tard, j’aimerais bien faire des musiques de film, de pubs, de supports audio ou vidéo en tout genre. Pour ça, j’ai besoin de l’harmonie ». Même si certain y arrivent sans, lui voudrait se libérer pour s’exprimer pleinement, comprendre dans quel système il se situe. Alors, il bouffe du tuto et dévore des bouquins de Jazz depuis deux ans et demi. « Quand j’avais 15 ans, il n’y avait pas Youtube ! C’est con, mais ça change beaucoup de choses ».

« En France les gens sont frustrés par l’aspect théorique et le côté conservatoire, dans les pays d’Outre-Manche, ils s’amusent en fait ! »

Aujourd’hui, David joue aussi bien en solo qu’en duo. Depuis 2013, la côte ouest se l’arrache. Pour son projet solo, « LeDeunff », il a simplement recollé son nom. Alors artiste sans particule, il s’éclate. Sur scène David est habité par le Blues, sa voix dégage la Soul du Reggae et le rythme du Hip Hop. Des reprises acoustiques à contre pied, sur les textes inspirants de Verlaine ou dans un anglais qui sonne bien, David n’attend pas une tournée de Zénith pour tester des chansons : « En bar tu peux prendre des risques ! Tu peux te permettre des choses que tu ne peux pas te permettre dans une salle où les gens ont payé 30 balles ! » Et puis, pour lui, la proximité des gens, c’est ressentir leur sueur et leur joie de vivre.

Passionné et friand d’évoluer, David aime autant les petites ballades à deux trois accords que les musiques assez progressives comme King Krimson ou Frank Zappa. « Eux, il connaissent un petit peu leur gamme de Do ! », plaisante-t-il. Quand il commence la musique à Belle île, on lui apprend d’abord à s’amuser : « On ne m’a pas embêté avec la théorie tout de suite, par contre on m’a stimulé, on m’a appris à me faire plaisir, et ça, je l’ai toujours ». Un apprentissage plus Anglo-Saxon que Français selon lui, « En France les gens sont frustrés par l’aspect théorique et le côté conservatoire, dans les pays d’Outre-Manche, ils s’amusent en fait ! ».

Chez lui, à Chantenay, David écoute de l’électro. Il a transformé son garage en studio. Un petit jardin, deux chiens, sa copine qui vit aussi de ses passions, il se sent bien. Pas encore papa, David consacre sa vie, du moins ses journées, à la musique. 8H34, un œil qui se lève, 9H30 à 17H  au boulot : travailler des gammes et faire de la guitare, c’est sa liberté chérie. Il promène ses chiens, et s’y remet. Et le week-end, il est en concert. Pourquoi pas la scène Parisienne ? « Quand je bosse les week-ends dans les bars et les restaus, la semaine mon capital social est épuisé : je rentre chez moi, je passe deux jours sans parler à personne ». Une déconnexion nécessaire, même à Nantes. David tient à sa qualité de vie. « Paris… Je n’ai ni les moyens, ni la philosophie pour claquer autant de thunes dans… juste la vie. Je ne connais pas ça moi : je suis né en Guadeloupe et j’ai vécu à Belle île », rappelle-t-il comme une évidence.

« Je n’étais plus le même, on pouvait me dire ce qu’on voulait, moi c’était de la zic que je voulais faire ! »

Plus jeune, David voulait être professeur d’Anglais. Mais il arrête l’école en terminale, avant même de passer son BAC. L’élément déclencheur, c’est son prof de Français : « David, je vois que tu es habité par la musique, il existe un truc qui s’appelle intermittent du spectacle. Si tu remplies tant de concerts, dans telle période, et bien tu peux en vivre ». Il est transformé. « Je n’étais plus le même, on pouvait me dire ce qu’on voulait, moi c’était de la zic que je voulais faire ! » Avec un père douanier et une mère assistante maternelle, il doit gagner leur confiance. Pas musicien, mais mélomane, son père lui a beaucoup transmis. Si David est aussi riche musicalement c’est aussi grâce à lui. De Debussy à Marley, en passant par Gainsbourg et Nirvana, « depuis tout petit j’ai entendu un nombre incalculable de choses, du coup j’ai un tas de références dans le crane ». Et du vécu pour écrire. « Je suis pas très vieux, mais j’ai quand même quelques vies derrière moi. Tout ca pour dire que l’inspiration côté amoureux, il n’y a pas de problème ». L’air malicieux, il sourit en imitant une scène vécue : « Tu écris une chanson pour moi ? », « Ba non en fait », se moque gentiment l’auteur en se repassant My Storm.

« En fait, je suis un des plus chanceux des fans d’Hocus Pocus, je suis le fan qui a réussi à jouer dedans ! »

David a eut la chance d’être à bonne école. A l’époque, il a 23 ans quand la scène musicale nantaise révèle Hocus Pocus. Un joyeux mélange de Hip Hop et de Soul. Le groupe n’est pas encore véritablement connu, mais déjà reconnu pour son talent, quand David l’intègre au hasard des rencontres. 20syl, le fondateur, cherchait un guitariste et un chanteur un peu dans le « groove Hocus » pour faire des prises pour l’album 73 touches qui était en enregistrement. Ami d’ami skateur, l’information arrive vite aux oreilles de David. Ni une ni deux, il demande à voir 20syl : « Là, je lui joue deux trois accords et il me dit : ‘’ça c’est cool, est-ce que je peux l’enregistrer ? J’ai peut-être un texte qui va dessus’’. Et ça a donné J’attends. » David peut être fier. « Ce qui est marrant c’est que, comme beaucoup de gens, je suis fan d’Hocus. En fait, je suis un des plus chanceux des fans, je suis le fan qui a réussi à jouer dedans ! »

Ses débuts à Nantes sont de groove et d’applaudissements, d’impro et de sueur. Le premier concert avec Hocus Pocus, il s’en souvient comme si c’était hier, à Montoir la Bretagne,  « le lendemain on était aux Francofolies de La Rochelle, on se retrouve à jouer avant Oxmo et Anis. Je m’en souviendrais toute ma vie, c’était le 17 juillet 2005 », et ses yeux scintillent encore. Quatre, cinq, six chansons avec eux sur scène… Jusqu’au jour où ils lui disent : est-ce que tu veux faire partie du groupe ? Et l’aventure commence. De 2006 à 2011 : 3 albums, jusqu’à 20 dates par mois, 120 concerts à l’année. Puis, Hocus Pocus a peu à peu devancer C2C, dixit « coup de cross », alors, quand la tournée du troisième album s’est arrêtée, ils ont fait une pause pour laisser à nouveau la place à C2C, devenu un succès mondial. « On verra si l’avenir nous fait repartir sur les routes. En tout cas, aujourd’hui c’est ce qui est prévu… », balance-t-il comme une bouteille à la mer criant le retour d’Hocus Pocus pour l’été prochain.

De bars en scènes, de projets en enregistrements, sponsorisé par les guitares LAG, David garde le cap et travaille : « Si la gloire me cherche, elle sait où me trouver » dit-il en riant, « Bon après, quand on voit un mec comme Trump président, on est dans une génération où tout peut arriver ! » ironise l’artiste.

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La question Fler :
De qui ferais-tu le portrait ?

Je ferais le portrait de François Ier !

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